Blottie sur les pentes de l’Outheran, bénéficiant d’une eau très pure à la température constante, la pisciculture a deux rôles bien différents selon les périodes de l’année : Au printemps et en été elle accueille temporairement les truites arc-en-ciel (bandeau ci-dessus) destinées à être relâchées dans le Lac de la Pisserotte durant la belle saison.
Sa mission est autrement importante d’octobre à avril… Car se pratique ici une activité passionnante, l’assistance à la reproduction des truites fario de la vallée.
Pourquoi aleviner ?
Selon les secteurs, en fonction de divers facteurs agissant sur la survie des alevins (température de l’eau, crues hivernales plus ou moins fortes, qualité du fond de gravier), la reproduction naturelle est satisfaisante ou pas. Sur les têtes de ruisseau, par exemple, la température de l’eau est plutôt favorable (6 à 8°) alors qu’elle est beaucoup plus basse sur l’Hyères (2 à 4°), ce qui entraîne une incubation deux fois plus longue et des risques ainsi multipliés. Autrement dit, la reproduction naturelle est parfaite dans certains endroits, et plus difficile en d’autres. C’est alors ici que nous intervenons…
Un peu d’histoire pour mieux comprendre la suite… (d’après un article de Mr R. Martin sur le bulletin annuel 1999 de la Gaule des Coudans). Initialement existaient en France deux types de truites farios : l’océanique et la méditerranéenne, en fonction de leur habitat tout simplement : ruisseaux coulant vers l’ouest pour les unes, vers le sud pour les autres ! Au XIXème siècle, croyant bien faire en alevinant, l’homme a mélangé les souches, un moindre mal si l’on compare à ce qui s’est fait par la suite…
En effet, vers 1950 ont été lâchées des truites provenant d’Europe de l’Est, à fort potentiel de rentabilité par un grossissement rapide. Une belle qualité pour les élevages certes, mais les truites se sont montrées parfaitement inadaptées à la survie en rivière ! Un comble !
Quant à la souche initiale sauvage, elle avait pratiquement disparue !
Depuis 1989 et durant une dizaine d’année, la Gaule des Coudans a tout d’abord réintroduit des alevins de souche sauvage pour remédier au problème. Les oeufs provenaient de la Meuse et effectuaient leur incubation au laboratoire de la pisciculture. Ainsi la population de truites fario se montra fort bien adaptée au milieu.
Il fut alors décidé d’aleviner directement uniquement à partir de cette souche sauvage de notre vallée.
Et comment ça se passe ?
Plusieurs étapes sont nécessaires :
– la reprise des géniteurs dans l’Hyères, en octobre, novembre.
– la ponte et la fécondation (relâche immédiate des géniteurs le jour même) en décembre, janvier.
– la surveillance de l’incubation et la croissance des alevins au laboratoire
– le lâcher des alevins en mars.
La reprise des géniteurs
Les géniteurs sont sélectionnés : ils ne doivent être ni trop jeunes, ni trop âgés afin qu’oeufs et semences soient de bonne qualité. Cette activité est strictement encadrée par la Loi : un arrêté préfectoral, qui précise divers critères doit être obtenu pour ce faire.
Les poissons sont attirés par l’émission d’un faible champ électrique et capturés à l’épuisette.
Attention : ne pas confondre pêche à l’électricité, à l’aide d’un “martin-pêcheur” (nom du petit générateur) à des vues scientifiques ou de sauvetage (il est en effet possible, avec autorisation préfectorale, lors de grande sècheresse de prendre ainsi les truites piégèes par la baisse des cours voire l’assèchement partiel du ruisseau) et la pêche électrique des braconniers dont l’objectif est bien de tuer le poisson, quel qu’il soit, autre faune aquatique compris ! Rien à voir !
Ici, le poisson repart gaillard, dès que le courant, de faible intensité, cesse.
Les truites, dénombrées suivant l’autorisation, sont conduites à la pisciculture jusqu’à ce qu’elles soient prêtes à pondre, pour les femelles ou à lâcher leur laitance, pour les mâles.
La ponte et la fécondation
Les truites sont endormies, mesurées et pesées, les oeufs sont recueillis ainsi que la laitance. Délicatement mélangés, les oeufs sont fécondés. Quelques minutes plus tard, ils rejoignent les bacs incubateurs du petit laboratoire de la pisciculture pendant que les géniteurs sont libérés dans la rivière.
L’incubation et la croissance au laboratoire
L’incubation dure environ deux mois. Pendant la première phase, les oeufs doivent être dans l’obscurité, bien au calme. Plus tard, on commence à distinguer les yeux des embryons. A l’éclosion, nos bébés poissons sont en réalité des sortes de larves, incapables de nager, qui vivent sur les réserve de la vésicule située sous leur ventre pendant environ un mois.
Lorsque ce sac, dit vitellin, est résorbé, les alevins sont aptes à rejoindre la rivière.